Les biais cognitifs
La croyance et la propagation de fausses nouvelles reposent toujours sur quelques mécanismes intellectuels parfaitement identifiés qui amènent des failles dans les raisonnements qu'on peut avoir face à la découverte d'un fait ou d'une situation nouvelle, et donc à l'interprétation qu'on en aura.
Ces failles dans les raisonnements sont directement liées à la façon dont notre cerveau fonctionne et s'adapte sans cesse à son environnement en mettant en place des stratégies pour résoudre les problèmes auxquels il peut être confronté. Ces stratégies sont connues sous le nom générique de « biais cognitifs » ; il en existe un nombre très important.
Définition : Le Codex des biais cognitifs
Méthode :
Pour simplifier, on considère qu'on peut regrouper ces différents biais ou « effets pervers » dans nos raisonnement en 4 grandes catégories :
Ceux qui découlent d'un trop-plein d'information et qui nous obligent donc à filtrer énormément la masse d'infos qu'on reçoit,
Ceux qui découlent d'un manque de sens dans les information qu'on reçoit (par manque de connaissances globales, par des lacunes dans les compétences qui permettraient une bonne compréhension), et qui peuvent rendre confuse leur interprétation : notre cerveau aura tendance à « remplir les trous ».
Ceux qui découlent des limites de notre mémoire : la quantité d'informations reçues implique forcément un tri, on ne s'encombre que du strict nécessaire.
Ceux qui découlent de la nécessité d'agir vite pour ne pas être laissé sur le côté du rythme de notre vie sociale et médiatique : nous sautons directement aux conclusions.
Exemple :
Ci-dessous, pour chacune des 4 catégories évoquées précédemment, quelques exemples marquants de mécanismes intellectuels ayant un rôle important dans l'interprétation des informations reçues et / ou dans la propagation de fausses nouvelles.
La totalité des biais cognitifs listés sur l'image ci-dessus sont sont décrits de manière plus complète dans le document suivant :
Trop plein d'informations⚓
➜ Nécessité impérative de faire du tri
Définition : Biais attentionnel
Nous n'examinons pas forcément toutes les possibilités lorsque nous considérons quelque chose, quand nous sommes confrontés à un problème, à une information nouvelle ; notre attention est souvent focalisée sur certains points au détriment d'autres, en fonction de notre état émotionnel.
Définition : Illusion de fréquence
On a tendance à remarquer plus facilement les différentes occurrences d'un phénomène donné une fois qu'on a commencé à le chercher, et donc, à croire de manière erronée qu'il est plus fréquent que ce qu'il n'est en réalité.
Définition : Effet d'ancrage
On a du mal à se débarrasser de sa première impression, et donc, on a tendance à privilégier l'information qu'on a vue en premier, sans chercher forcément à en trouver d'autres ensuite, que ce soit pour la confirmer ou l'infirmer.
Définition : Biais de confirmation
Un des plus connus, un élément essentiel dans la mécanique de propagation de fausses nouvelles, surtout depuis l’apparition des réseaux sociaux dont les algorithmes qui définissent leur fonctionnement accentuent considérablement le phénomène : on a tendance à privilégier les informations qui confirment ses propres idées ou hypothèses, ou inversement, à accorder moins de crédit à celles qui vont à l'encontre de nos propres conceptions.
Ce biais participe largement à l'enfermement intellectuel des individus dans leur « bulle informationnelle ».
Manque de sens⚓
➜ Nous adaptons en permanence nos idées en fonction de notre capacité à interpréter les informations qu'on reçoit.
Définition : Effet de dévaluation réactive
Nous avons tendance à dévaluer automatiquement une affirmation, une proposition, à partir du moment où elle émane d'une personne connue comme étant opposée à nos idées, comme antagoniste.
Définition : Argument d'autorité
Ce biais repose sur le fait qu'on a tendance à accorder plus de valeur à un argument en fonction de son origine, en particulier s'il provient d'une certaine autorité reconnue, sans se préoccuper de son contenu.
Définition : Effet de mode – Mouton de Panurge
Il est parfois difficile de résister à la pression sociale selon l'entourage dans lequel on se trouve ; elle peut inciter à un certain mimétisme des idées et il devient difficile de maintenir une position pour défendre une idée avec des arguments rationnels face à une majorité opposée.
Définition : Illusion des séries
Un autre grand classique dans toute bonne théorie du complot qui se respecte : la tendance à percevoir (à tort, évidemment) des corrélations, des coïncidences dans des données prises au hasard.
C'est la fameuse confusion (volontaire ou non) entre corrélation et causalité :
Accès direct à la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=A-_naeATJ6o
Définition : Négligence des probabilités
Le manque de connaissances en matière de probabilité amène certaines personnes à bâtir leurs raisonnements sur des interprétations abusives, à sur-évaluer certains « dangers » statistiquement inoffensifs et à sous-évaluer certains autres qui sont plus préoccupants.
Exemple : la polémique sur les « risques » de la vaccination ou celle sur les attaques de baigneurs par des requins, etc.
Les limites de la mémoire⚓
➜ Que devons-nous conserver comme souvenirs, comme informations, que devons nous éliminer ?
Définition : Effet de primauté
L'information reçue en premier est plus déterminante et sera mieux mémorisée qu'une autre information reçue par la suite ; la première impression – qu'elle soit positive ou négative – aura beaucoup plus d'influence sur une personne qui aura du mal à s'en départir.
Définition : Effet de désinformation
Il s'agit d'un effet d'interférence rétroactive qui peut se produire à la réception d'une nouvelle information concernant un événement donné. Cette nouvelle information pourra amener une personne à ré-évaluer les informations qu'elle possède déjà, qu'elle a déjà « enregistrées » dans ses souvenirs, au risque de fausser ces souvenirs.
Définition : Préjugés et stéréotypes
Les préjugés sont des attitudes généralement négatives à l'égard des membres d'un groupe auquel on n'appartient pas. Ils sont souvent liés à des stéréotypes, c'est à dire des croyances, des généralisations qu'une personne entretient au sujet des membres d'un groupe.
Ces préjugés et stéréotypes sont très « résistants » à toute nouvelle information qui viendrait les infirmer.
Nécessité d'agir vite⚓
➜ Nous devons en permanence réagir à de nouvelles informations, à l'imprévu, à l'incertitude, c'est un mécanisme d'adaptation.
Définition : Effet de faux-consensus
Tendance à surestimer le nombre de personnes qui partagent nos opinions : on pense que nos opinions, nos activités, nos préférences sont beaucoup plus communes qu'elles ne le sont. Une cause possible est notre tendance naturelle à nous entourer de personnes avec lesquelles on partage des valeurs communes et des opinions proches.
La conséquence en est qu’on peut arriver à croire une information comme étant communément admise et partagée par une grande partie de la population alors qu’il n’en est rien en réalité.
Définition : Loi de futilité de Parkinson
Tendance à donner une importance disproportionnée à des éléments insignifiants, car ils sont plus simples, faciles à saisir, au détriment d'éléments plus importants mais plus complexes : ce qui est plus important est plus difficile à maîtriser, donc, plus difficile à critiquer de manière constructive.
Définition : Biais de croyance
On peut avoir tendance à former des hypothèses en fonction de ce que l'on croit, de ce qu'on imagine comme étant vrai et donc, de ce qu'on désire voir confirmer, plutôt que se baser sur des faits et de prendre en compte l'évidence, la réalité.
C'est toute la différence entre la « méthode scientifique » et la « méthode idéologique », entre « savoir » et » croire »…
Définition : Effet Barnum
Une personne aura tendance à valider une information (de manière totalement subjective) parce qu'elle y a trouvé une signification personnelle – alors que l'information peut s'appliquer à n'importe qui.
Un exemple typique est le contenu des textes d'horoscope : des citations tout à fait banales et générales sont pourtant perçues par certaines personnes comme s'adressant spécialement à elles, comme ayant été écrites pour elles, ce qui renforcera automatiquement leur confiance en l'auteur de ces informations.